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exprimée, que nos cœurs n’ont jamais trahie : telle a été et telle sera toujours notre religion politique.

Loin de nous d’imiter nos adversaires dans leurs violences et leurs calomnies. Mais que les hommes du 13 mars nous disent si une seule de leurs promesses a été tenue ?

Ils devaient réunir autour du trône toutes les opinions, et ils ont jeté des divisions funestes parmi des hommes généreux que rapprochaient l’amour de la liberté et le sentiment du danger de la patrie.

Ils devaient affermir la révolution, et ils ont brisé ses appuis naturels par la dissolution des gardes nationales des villes les plus belliqueuses et les plus dévouées.

Ils devaient favoriser la liberté de la presse qui sauva la France, et ils l’ont traquée avec leurs réquisitoires, ruinée avec les impôts, corrompue avec leurs amortissements, accablée avec les amendes.

Ils savaient que l’immense majorité de la nation et de la chambre des députés voulait abolir l’hérédité de la pairie, et ils ont traité de visionnaire et de folle la volonté nationale et parlementaire.

Ils avaient déclaré qu’ils feraient régner l’ordre légal, et il n’est pas une loi dont ils n’aient perverti ou faussé l’application :

Qu’ils s’appuieraient sur les chambres, et ils ont étouffé leur initiative ; qu’ils acquitteraient, par l’hospitalité, la dette de la France envers les patriotes réfugiés de la Pologne, de l’Italie de l’Espagne, et ils ont flétri cette hospitalité par les conditions honteuses qu’ils y ont attachées.

Ils nous garantissaient la sécurité intérieure, et sans cesse elle a été troublée par des émeutes, par des conflits violents entre les peuples et l’autorité, par les aggressions de plus en plus audacieuses du gouvernement déchu.

Ils nous annonçaient un désarmement général, et ils nous ont si bien enlacés dans un dédale inextricable d’intrigues diplomatiques, qu’il leur est impossible à eux-mêmes d’assigner un terme à cet état d’anxiété qui n’est ni la paix, ni la guerre, et qui tue notre commerce et notre industrie.

Enfin, dans quelle situation le système de la quasi-légitimité laisse-t-il la France, après deux ans d’expérience ? Au-dehors, la coalition des rois n’est-elle pas plus menaçante que jamais ? Au-dedans, la guerre civile n’est-elle pas flagrante ? Ces soldats qui bordent nos frontières, ces complots, ces tentatives, ces troubles sans cesse renaissants dans l’Ouest et dans le Midi, ne suffiront-ils pas pour ouvrir les-yeux du pouvoir ? Attendra-t-il, pour se prononcer, que nos départements soient en feu, nos provinces envahies, la France compromise, et qu’elle ne puisse se sauver qu’en prodiguant à la fois ses enfants et ses trésors ?

Nous le proclamons avec une douloureuse et profonde conviction que ce système se prolonge, et la révolution de juillet et la France sont livrées à leurs ennemis.

La Restauration et la Révolution sont en présence la vieille lutte que nous avions cru terminée recommence. Que le gouvernement choisisse : le position équivoque qu’il a prise n’est pas tenable. Elle ne lui donne ni les forces de la Restauration, qui est irréconciliable, ni celles de la Révolution, qui s’irrite et se défie.

La France de 1830 a pensé comme celle de 1789, que la royauté héré-