Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/144

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le statu quo, n’aurait-on pu le sauver par une révolution ? Si l’élément turc y était sans vigueur, n’aurait-on pu chercher une vie nouvelle dans l’élément arabe ? Si la Turquie était impossible par Mahmoud, ne fallait-il pas essayer de la rendre possible par Mébémet-Ali ? Tel est le système qui, comme nous le verrons par la suite de cette histoire, obtint en France le plus de faveur. Et pourtant il était chimérique aussi.

Méhémet-Ali avait, sans nul doute, accompli de grandes choses. Il avait extirpé, en l’absorbant dans sa famille, la domination des Mameluks, sujets du sultan ; il avait fait de son pachalick d’Égypte une souveraineté presqu’indépendante il avait tiré en quelque sorte du néant une armée instruite et disciplinée à la façon des armées d’Europe ; dans un pays qui manque de chanvre, de fer, de bois de construction, il était parvenu, au moyen de ses trésors, à créer une marine ; l’Égypte, à sa voix, s’était couverte d’ateliers et d’établissements dirigés par des Européens et surtout par des Français ; en un mot, il avait su mettre au service de sa puissance orientale l’expérience, la science, l’industrie et les arts de l’Occident. Puis, au-dessous de sa gloire, brillait celle de’son fils-Ibrahim, guerrier terrible et intelligent, plein de confiance dans le sort des batailles, plein de foi dans le génie paternel, bras de cette —Égypte dont Méhémet-Ali était le cœur et la tête.

Il y avait là, certes, de quoi éblouir, et il était naturel que la France, dont Méhémet-Ali aimait à se dire le protégé et l’élevé, ne vît en lui qu’un con-