Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/343

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des obstacles sérieux. Réduisons-la au silence par une retraite qui, mettant au grand jour l’infériorité de nos adversaires, ne servira qu’à nous faire rentrer au pouvoir d’une manière triomphale. »

Ce projet devait plaire à M. Guizot, dont il remuait l’âme dédaigneuse. M. Thiers, de son côté, soupirait après quelques jours de repos. Car il se lassait aisément du pouvoir, précisément parce qu’il était dans sa nature de l’exercer avec beaucoup d’ardeur. Le Cabinet allait donc se dissoudre. Mais, parmi les ministres, il y en avait un qui n’entrait pas dans le plan de ses collègues : c’était M. Persil, garde-des-sceaux, ministre de la veille : il lui en coûtait de faire, après une carrière si courte et sur un espoir incertain, le sacrifice de son ambition. Aussi sa résistance fut-elle opiniâtre, et lorsque ses collègues offrirent leur démission, il s’engagea entre lui et M. Thiers, en présence du roi, un débat d’une violence extrême.

La crise ministérielle, comme il arrive souvent, se traîna pendant plusieurs jours de péripéties en péripéties. Bien que le ministère, ainsi que nous venons de le dire, couvât avec complaisance l’idée de couvrir le tiers-parti de ridicule en lui faisant place, on essaya diverses combinaisons en vue du maintien du Cabinet. Mais à qui en confier la direction ? C’était là, sans contredit, la plus grande des difficultés. M. Thiers était trop jeune, à cette époque, il était trop nouveau dans les affaires pour qu’on songeât à l’élever à la présidence du Conseil. M. Guizot, à cause de son importance et de son âge, aurait pu prétendre à cette dignité ; mais il était doctri-