Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/365

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pas. Oui, cela est écrit, comme sont écrites quarante mille lois de vengeance par lesquelles les partis se sont décimés les uns les autres pendant vingt ans, et qu’on n’a pas cru devoir nommément abolir, parce qu’on pensait qu’elles n’oseraient plus affronter les regards d’une nation policée et libre. Nous ne pouvons reprocher qu’à nous-mêmes, hommes de la révolution de juillet, l’oubli qui a laissé aux pouvoirs nouveaux de telles armes. Nous apprenons à nos dépens que la liberté ne se défend pas par les mœurs de la paix et par l’opinion publique, si avancée qu’elle soit, mais par la clarté, la force, la parfaite harmonie des garanties qu’on a su obtenir avant de déposer les armes.

La révolution de juillet a été fort louée de son extrême mansuétude, et ce n’est pas nous qui l’en blâmerons ; car si nous lui avons imprimé l’audace au moment de la lutte, nous lui avons aussi prêché l’humanité. Mais la postérité lui reprochera son incroyable ingénuité de confiance. A peine était-elle sauvée de la baïonnette des Suisses, qu’elle tombait dans la mésalliance qui l’étouffe aujourd’hui. Nous avons eu notre part dans ces fautes du courage inexpérimenté et nous en portons la peine. C’est que la Restauration ne nous avait formés qu’à la haine, et la nature demi-théocratique de ses moyens d’oppression nous avait confinés dans les redites de l’incrédulité voltairienne. C’était presque là toute notre éducation libérale ; nous avions des haines plébéïennes et philosophiques, presque point d’opinions