Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/392

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’orgueil et d’espérance. Car, c’est un hommage profond rendu à la liberté, que cette pusillanimité de la force ; et il est beau de voir les victorieux mentir au sentiment de leur propre triomphe, et manquer, même devant la certitude de leur impunité, du courage de leur violence.

C’était sur une simple ordonnance du roi que la Chambre des pairs, saisie du procès d’avril, s’était constituée en cour de justice.

Or, la Charte avait été violée par là de la manière la plus audacieuse. La Charte avait dit, en effet : « Nul ne pourra être distrait de ses juges naturel. » Et comme pour enlever d’avance à la tyrannie la ressource des interprétations perfides, les législateurs avaient ajouté : « Il ne pourra en conséquence être créé des commissions et tribunaux extraordinaires, à quelque titre et sous quelque dénomination que ce puisse être. » Qu’imaginer de plus formel ?

Il est vrai qu’une exception au principe se trouvait consacrée dans l’article 28, ainsi conçu : « La Chambre des pairs connaît des crimes de haute trahison et des attentats à la sûreté de l’État qui seront (QUI SERONT) définis par la loi. » Mais cette loi qui devait définir l’attentat, et sans laquelle l’article 28 était comme non-avenu, cette loi n’avait pas encore été faite. La haute juridiction de la Chambre des pairs ne pouvait donc entrer en exercice que par un cynique renversement des lois fondamentales du royaume.

À ce raisonnement, appuyé sur des textes positifs et confirmé d’ailleurs par un arrêt mémorable[1], il

  1. En 1815, M. de Lavalette avait été condamné à mort par la Cour