Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/403

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font a leur taille, parce qu’autrement ils ne le pourraient conduire. Ce n’est pas ainsi qu’agissent les hommes de génie. Ceux-là ne s’étudient point à éteindre les passions d’un grand peuple ; car ils ont à les féconder, et ils savent que l’engourdissement est la dernière maladie d’une société qui s’en va.

Privés de la faculté de se défendre selon leur désir et selon leur droit, les accusés détenus à Ste.-Pélagie avaient résolu de ne plus opposer à leurs juges que le silence et le dédain. « Vous nous condamnerez, mais vous ne nous jugerez pas », avaient dit à M. Pasquier, en le quittant, MM. Lebon, Marrast et Landolphe. Il s’agissait pour les accusés de tenir parole, et de se borner à ennoblir la position de victimes que leur faisaient des inimitiés sans grandeur.

Malheureusement, il n’y avait pas unanimité de vues entre les accusés des diverses catégories.

Les Parisiens, d’accord en cela avec les sous-officiers de Lunéville, pensaient que, la force l’emportant sur la justice, il y avait devoir de s’abstenir ; qu’une protestation muette était préférable à une défense mutilée ; que, puisque la Cour des pairs osait prétendre aux bénéfices de l’arbitraire, il fallait lui en laisser les embarras et l’odieux qu’il importait, en un mot, d’arracher au parti du gouvernement ce masque de légalité dont il avait un moment voulu couvrir ses vengeances.

Les Lyonnais envisageaient la situation sous un autre aspect. Ne pas se défendre, c’était perdre l’occasion de lire à la France attentive une des pages les plus mémorables de l’histoire de Lyon : pouvait