Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/176

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chaînement inévitable, dans ces courses aventureuses à travers des montagnes et des déserts, dans ce passage dont la destruction marquait l’empreinte au milieu des villes, dans cette chasse aux hommes incessante et tragique, y avait-il l’éclat, y avait-il le profit d’une véritable conquête ? Et quel tableau à tracer que celui de tant de marches dévorantes ! Car ce n’était rien que le couteau des Arabes, en comparaison des fièvres et des dyssenteries qui accablaient les troupes. Heureux en campagne, le soldat qui, partageant avec les chameaux la charge des vivres, n’avait qu’à se fatiguer et à combattre ! Mais combien qui, attaqués par la maladie, périssaient misérablement, faute d’un suffisant abri sous la tente et d’un peu de paille sur le sol humide où ils avaient couché :

L’occupation, telle que jusqu’alors on l’avait entendue, était d’ailleurs de nature à donner aux soldats une éducation de férocité. En 1832 on avait vu Joussouf rentrer à Bone à la tête d’une troupe qui portait, surmontant le drapeau de la France, une tête de Maure. Parmi les objets composant le butin fait sur la tribu d’El-Ouma, sous le gouvernement du duc de Rovigo, on avait vendu, à Bab-Azoun, des boucles d’oreilles tachées de sang et des bracelets encore attachés au poignet coupé ! Ce fut aussi quelquefois pour nous un exemple contagieux que celui des moissons brûlées, des razzia ; et nous ne nous contentâmes pas toujours de ressembler aux Arabes par le costume de nos zouaves ou de nos spahis. Ajoutez à cela toutes sortes d’entreprises hideuses tentées par