Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/20

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Pour ce qui est de Fieschi, comment décrire son attitude et son rôle dans ces déplorables débats ? La tête haute, le regard superbe, le sourire du triomphe sur les lèvres, il marquait ses victimes d’un geste théâtral et se haussait en quelque sorte sur son infamie, amusant les juges par des bouffonneries ignobles, faisant l’orateur, affichant des prétentions d’érudit, visant à l’effet, attendant qu’on l’applaudît, ainsi qu’un bateleur sur ses tréteaux. Et parmi les juges, il s’en trouva qui l’applaudissaient. À chacune de ses atroces pasquinades, on se mettait à rire, sur les bancs de la pairie, de ce rire approbateur qui semble encourager. L’assassin venait-il à se lever ? les lorgnons se braquaient de toutes parts sur lui, comme en un spectacle. Faisait-il signe qu’il avait à parler ? aussitôt des voix impatientes s’élevaient « Fieschi a demandé la parole ; Monsieur le président, la parole est à Fieschi. » On ne voulait pas perdre un mot de ce qui pouvait sortir de la bouche de ce grand homme Et lui ne se possédait pas d’orgueil et de joie. Sa main sanglante cherchait des mains à presser publiquement. et elle en trouvait. Il échangeait avec sa concubine, placée dans les tribunes, des signes d’intelligence et d’affection. Il posait, il trônait. Que dire encore ? C’était lui qui dirigeait les débats, lui qui excitait ou gourmandait les témoins, lui qui exerçait les fonctions d’accusateur public, lui qui gouvernait l’audience. Etait-il rien qui ne lui fut permis ? Tantôt, pour donner une idée de la manière dont il fallait viser, il criait à M. Pasquier en le couchant en joue avec ses doigts « Je suppose,