Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/22

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des accusés fut aggravée par une circonstance inattendue. Irrité d’une déclaration de Pépin dirigée en apparence contre lui, et vaincu d’ailleurs par les larmes de sa mère, qui le conjurait de tout avouer, Boireau exposa, le février (1836), que si, la veille de l’attentat, il avait fait une promenade à cheval pour que Fieschi pût ajuster ses canons, c’était à la demande de Pépin, qui devait la faire lui-même.

Il y avait là, pour Pépin, comme un coup de foudre. Et pourtant ce fut le signal de la transformation qui s’opéra subitement en lui, transformation complète et véritablement phénoménale. L’un de ses deux avocats, Me Marie, s’était empressé de l’aller voir dans sa prison, au sortir de l’audience. Il le trouva plein de calme, de résolution et de dignité. « Boireau m’envoie à la mort, dit le prisonnier, et je pourrais bien aisément me venger. Mais non… je ne veux pas l’exciter à charger aussi Morey. » À dater de ce moment, Pépin fut un autre homme. Sa figure prit une expression de fermeté simple et touchante sa parole devint lucide ; on eût dit que des horizons nouveaux venaient d’apparaître à cette intelligence jusque-là si bornée.

La compassion qu’il avait généralement éveillée s’en accrut. Il n’avait en effet échappé à personne que si un homme de la nature de Pépin avait trempé dans un complot du genre de celui qu’on jugeait, ce ne pouvait être que par entraînement, terreur ou faiblesse. On l’accusait d’avoir commandité le crime ? Mais l’argent donné par lui, l’avait-il offert spontanément ou pour obéir à une influence