Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/414

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attachée à la personne de M. Thiers ; que, lui absent, l’ordre renaîtrait aussitôt. Et une ambassade lui fut offerte. Or, on faisait courir, pendant ce temps, le bruit mensonger que ses affaires étaient embarrassées et qu’il avait dû recourir à la bourse de ses amis. Il crut comprendre où l’on en voulait venir. Mandé par le roi, il lui dit : « Je ne saurais accepter un exil avec appointements. Mais que le roi déclare par écrit qu’il regarde un voyage de moi au dehors comme propre à faciliter le dénoûment de la crise : ce sera un ostracisme. Je le subirai. » Et le soir même, un grand nombre de députés M. Barrot en tête, couraient chez lui pour l’entourer de leurs sympathies et le fortifier dans son refus.

Les choses en étaient là, quand, le 1er  avril, on apprit qu’un Cabinet venait enfin d’être formé. Mais quelle ne fut pas la surprise du public en lisant dans le Moniteur les noms de MM. de Montebello, Gasparin, Girod (de l’Ain), Cubières, Tupinier, Parant, Gauthier ! « Au temps des disputes de Fox et de Pitt, s’écria la Revue des Deux-Mondes, l’Angleterre resta sept semaines sans ministère, crise qui eût duré plus long-temps si Georges III n’eût déclaré que, las de ces entraves~ il était décidé à aller à Charring-Cross et à prendre pour ministres les sept premiers gentlemen qu’il rencontrerait » La liste publiée par le Moniteur donna lieu à des commentaires encore plus injurieux. Paris s’agita. Il y eut des rassemblements sur les places publiques, des cris confus, des murmures précurseurs de l’émeute, des charges de cavalerie !