Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/512

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les Anglais s’imposent, nous semons la pensée. Glorieusement inhabile à se fixer, la France est comme le Nil : ce qu’elle submerge elle le féconde, et elle passe. Raison de plus pour qu’elle veille sur sa force, puisque les peuples en marche vers la liberté souffriraient de notre affaiblissement, et que la civilisation serait entamée par nos revers.

De son véritable génie résulte aussi, pour la France, le devoir de se répandre. Par son tempérament plus encore que par sa situation géographique, la France est une Puissance des mers. À sa nature communicative, à ses passions cosmopolites, il faut des issues. Enchaînée à ses ports, refoulée dans ses villes, repliée sur elle, forcée de retenir dans son sein sa chaleur exubérante et l’inextinguible foyer de son dévoûment, elle deviendrait terrible à ses voisins et à elle-même. Ce qu’on lui enlèverait en aventures héroïques on le lui rendrait en soulévements. Pour la sauver des agitations intérieures, sa prospérité navale est nécessaire. Et ce n’est pas une des moindres preuves de l’incapacité politique de la bourgeoisie, qu’un tel aperçu lui ait échappé.

Mais que dire de l’aveuglement qui a fait rechercher l’alliance anglaise alors qu’on s’attachait à maintenir en France un ordre social fondé sur le principe de la concurrence illimitée ? C’était vouloir deux choses absolument inconciliables. La concurrence poussant à une production indéfinie, sa logique conduit à l’établissement d’un vaste système maritime et commercial, à la possession de l’Océan. L’Angleterre pouvait-elle consentir au par-