Page:Bloy - La Résurrection de Villiers de l’Isle-Adam, Blaizot, 1906.djvu/45

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ment qu’il faudrait, le monument que voici, le seul qui exprime son génie exactement, puissamment, pathétiquement et à jamais, comme il tenta d’exprimer le vôtre en une œuvre qui ne peut pas périr.

Il est dit dans le Saint Livre que « nul n’est prophète en son pays ». Miraculeusement excepté de cette loi dure, on espère de vous, monsieur Edison, un mouvement grandiose en faveur du poète magnanime qui l’a subie dans sa rigueur, quand il vous glorifiait pour toujours.

Ce serait peut-être aussi le secret de le séparer une bonne fois et définitivement de la multitude banale qu’il a tant détestée. Il est, depuis dix-sept ans, au milieu des morts, cet Immortel, ce solitaire têtu qui ne put jamais se consoler d’être né au milieu des hommes.

« Je bois à vous, écrivait-il, je bois à vous, forêt, donneuse d’oubli ; herbes mouillées ; roses sauvages qui croissez sous les chênes, enivrées de la rosée qui tombe des lourds feuillages ; à vous, plages, où flottent, le soir, les senteurs salées des