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les dernières colonnes de l’église

bizarre qui l’eût épouvanté, et je ne me souviens pas de l’avoir entendu proférer ceci : « Je ne peux pas vivre sans mes morts », parole qui pourrait être sublime si elle portait sur le dogme de la Communion des Saints, mais qui, dans telle autre acception philosophique, est affreusement dénuée de sens.

Pauvre Bourget ! Pourquoi ne voulut-il pas se confesser alors, quand il était sans argent ? Obtiendra-t-il maintenant de se traîner à la pénitence, avec ce boulet épouvantable ?

Il y a, tout à la fin de son livre de misère et lui servant de conclusion, une phrase qui sera lue par une voix haletante, un soir de terreur, quand les quatre coins du monde seront en feu : « Vous pouvez fonder une famille bourgeoise parce que vous n’êtes pas de la première génération. Il en faut plusieurs. » Si ces mots ont un sens, ils veulent dire que deux pauvres n’ont pas le pouvoir ni la permission d’engendrer des Saints et de dilater ainsi le Royaume de Jésus-Christ.