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LA CASTE ET LA RÉVOLUTION BOUDDHIQUE

ni de l’éther ni du vent, et n’a pas fendu la terre pour paraître au jour, comme le feu qui s’échappe du bois de l’Âranî. Le Brahmane est né de la matrice d’une femme tout comme le Tchândâla. Pourquoi donc l’un serait-il noble et l’autre vil ? »

Mais ce n’est pas seulement le privilège du Brahmane qui est directement contesté. D’une manière plus générale on s’efforce d’atténuer les différences que la tradition brahmanique marquait entre les castes hautes et basses. Aux explications mythiques qui faisaient sortir chaque classe d’un membre de la divinité, on substitue des explications historiques et tout humaines de la division des fonctions[1].

« Nous voulons instituer un être qui, à notre place, réprimande celui qui mérite la réprimande. En récompense nous voulons lui donner une partie de notre riz. » Ainsi parlèrent les hommes lorsque les premiers vols leur firent comprendre la nécessité d’une force publique. Et ce fut l’origine de la royauté. Par des conventions analogues on expliquait l’origine du sacerdoce. C’était faire preuve sans doute d’un esprit déjà positif et critique, propre à ébranler les traditions sacrées qui sont les piliers du régime.

Qu’on y regarde toutefois de plus près : on constatera que l’esprit de la réforme bouddhiste est loin de posséder l’intransigeance combative que nous sommes portés à lui prêter lorsque nous le voyons à travers l’esprit de nos propres révolutions. On ne s’étonnera plus qu’en fait il ait laissé intactes les parties essentielles de l’édifice des castes.

  1. Oldenberg, loc, cit., p. 152, en note.