Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/226

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certaines nourritures soient exclusivement réservées, d'autres spéciale­ment prohibées à certaines parties de la population. Il semble bien que cette réglementation soit liée, le plus souvent, à des croyances totémiques : une plante, un animal apparaissent comme sacrés aux yeux de ceux qui en sont censés descendre. Ceux-ci ne peuvent y toucher, à plus forte raison en man­ger, sans péril de mort. Quelle influence de pareilles croyances devaient exer­cer, à travers les habitudes de l'alimentation, sur le système de la production même, sur la culture et sur l'élevage – en sauvegardant telles espèces de préférence à telles autres – c'est ce qu'a montré Frazer. En Inde, il semble que ce soit seulement chez les tribus anaryennes, vivant sur les confins de la civilisation hindoue, que nous retrouvons ces croyances à l'état pur. Mais chez les Aryens aussi elles ont laissé des traces, aussi bien dans les noms mêmes des gotras brahmaniques que dans les objets du culte de certaines castes 427. N'auraient-elles pas présidé de même à la détermination des aliments prohibés aux castes différentes 428 ?

Et, à vrai dire, si l'on reconnaît encore souvent, en cette matière, les scru­pules particuliers à telle ou telle caste, sur ce point comme sur bien d'autres, un courant d'unité passe pardessus les originalités ; il découle du prestige uni­versel des Brahmanes, qui continuent d'incarner l'idéal de la pureté aryenne. À leur exemple, nombre de castes, en même temps qu'elles adoptent le culte de la vache – dont on nous dit qu'il est, avec le respect du Brahmane,