Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/250

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professionnelle naissante se fond avec l'organisation familiale préexistante 471. Il n'est pas étonnant par suite que la distinction des professions n'entraîne pas ici les libérations escomptées. Si nous ne nous trouvons plus en présence d'une multiplicité de clans proprement dits, indépendants et égaux, si les groupements sociaux élémentaires sont désormais spécialisés en même temps que hiérarchisés, du moins restent-ils, à l'imitation des clans primitifs dont ils prolongent l'empire, exclusifs et oppressifs : chacun d'eux s'efforce, dans son isolement, de gouverner selon sa tradition propre toute la vie des membres qu'il renferme. Les arrangements d'autorité, comme disait Sumner Maine, laissent donc peu de place ici aux arrangements de liberté : le statut continue de refouler le contrat.

Schmoller propose 472 de distinguer entre deux types de spécialisation, dont les conditions d'établissement ne sont pas les mêmes : celle qui s'organise par ordre, sous l'autorité, par exemple, du groupe familial qui distribue les tâches entre ses membres, et celle qui s'institue librement, par exemple entre deux étrangers mus par la perspective des profits qu'ils pensent retirer de l'échange. La division du travail que nous rencontrons dans le régime des castes consti­tuerait un type intermédiaire entre ces deux types extrêmes : ce n'est plus à l'intérieur du groupe familial, c'est entre groupes différents que les tâches sont ici réparties. Mais cette répartition n'est pas organisée par la liberté d'individus échangistes à la recherche du plus grand profit. C'est toujours en présence d'une division du travail « contrainte » que nous nous trouvons, – soumis que restent les groupes spécialisés aux deux pressions, l'une redoublant l'autre des instincts ethniques et des traditions religieuses.

On retrouve par ce chemin l'idée exprimée par M. Ranade – à