Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

blanc à la boutonnière — dessinait ses grêles épaules. Les doigts qu’il allongeait contre sa tempe avaient la finesse de ceux d’une femme. La pâleur de son teint, que l’extrême régularité de sa vie teintait d’ordinaire de rosé, trahissait, en cette heure de tristesse, la profondeur du retentissement que chaque émotion éveillait dans cet organisme trop délicat. Un cercle de nacre se creusait autour de ses beaux yeux noirs ; mais, en même temps, un je ne sais quoi de hautain dans la ligne du front, coupé noblement ; la minceur énergique du nez, à peine busqué ; le pli de la lèvre, où s’effilait une moustache sombre ; l’arrêt du menton, frappé d’une mâle fossette ; d’autres signes encore, tels que la barre épaisse des sourcils froncés, trahissaient l’hérédité d’une race d’action chez l’enfant trop câliné des deux femmes solitaires. Si le général avait été aussi bon connaisseur en peinture qu’il était expert en armes, il eût certainement songé, devant ce visage, à ces portraits de jeunes princes peints par Van Dyck, où la finesse presque morbide d’une race vieillie se mélange à la persistante fierté d’un sang héroïque. Ce n’étaient pas des souvenirs de cet ordre qui le firent s’arrêter quelques secondes à cette contemplation avant de marcher vers la table. Hubert redressa cette tête charmante, que