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la terreur en macédoine

Une journée se passe, on mange à peine. Et malgré une cruelle parcimonie, les vivres s’épuisent avec une rapidité effrayante.

En face, les Turcs veillent toujours et rendent le blocus plus étroit encore. Ils tiraillent de temps en temps et, voyant qu’il n’est pas répondu à leur feu, se découvrent, font des gestes d’insultante bravade, lancent des injures, des provocations et des menaces.

Marko se multiplie. Il examine sans relâche les points faibles de la citadelle et conclut que l’attaque est possible seulement par le précipice. Il a fait demander en toute hâte des madriers, des troncs d’arbres, tous les éléments d’un pont qu’il veut établir sur l’abîme.

Par bonheur pour les assiégés, les matériaux sont éloignés, et la voie de transport presque impraticable.

Mais il attend, avec sa patience de tigre à l’affût, sentant d’instinct que les patriotes, pris au piège, ne trouveront pas d’issue.

Une deuxième journée s’écoule, plus rude et plus angoissante que la première. La tranchée s’allonge sous la voûte. On pioche toujours dans l’argile rouge. Il n’y a pas d’obstacle sérieux au terrassement, mais chacun se demande avec un cruel serrement de cœur :

« Que va-t-on rencontrer au bout ?… la terre friable jusqu’au flanc de la montagne ?… un dernier coup de pioche découvrira-t-il un coin du ciel… résonnera-t-il sur ce roc qui pèse de tout son poids sur les malheureux emmurés que la faim torture déjà…

— Allons, amis, courage et espoir ! »

Et les coups résonnent de plus en plus sourdement à mesure que la tranchée s’enfonce, pendant que