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la terreur en macédoine

— Laisse-moi !… je le veux !

— Non ! mille fois non !….il y a péril de mort… un chef ne doit pas s’exposer… ta vie appartient à l’œuvre !…

« Qu’importe si je suis tué… ce ne sera qu’un soldat de moins… il y en a ici un cent pour me remplacer.

« Donne-moi la bombe ! »

Les patriotes approuvent de la voix et du geste.

« Michel a raison ! tu n’as pas le droit de risquer ta vie !… Va, Michel !… va !… si tu succombes, nous te vengerons. »

Joannès baisse la tête, pousse un long soupir et remet à son ami le terrible projectile.

En quelques bonds, Michel arrive à la redoute. Il examine la position de l’ennemi, mesure de l’œil la distance et dit :

« Ils ne se doutent de rien… ça va tomber au milieu d’eux comme un pavé dans une mare à grenouilles. »

Avec une témérité inouïe, il quitte son abri, s’avance au bord du précipice et lance à toute volée la bombe.

Le projectile, décrit sa parabole, Michel se jette à plat ventre et suit de l’œil la course rapide.

Dans une seconde réellement tragique, il éprouve la joie féroce de voir la sphère de métal arriver, au plus dru.

Baoûm !… la bombe éclate au milieu d’un enchevêtrement fou d’hommes et de matériaux divers. Les hommes, crispés sous les fardeaux, s’abattent comme fauchés par la mitraille. N’étant plus soutenues, les poutres dégringolent sur les corps, les aplatissent et roulent de-ci, de-là, au hasard de chutes vertigineuses.