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la terreur en macédoine

Les produits ne sont pas énormes. Mais ils suffisent à ces braves gens, sobres, économes, rangés, qui aiment cette vie simple et ne désirent rien de plus. Chaque kilogramme de roses leur rapporte de quinze à vingt-cinq centimes — plutôt quinze que vingt-cinq, — et ils se déclarent très heureux.

Notons en passant, et à titre de document, qu’il ne faut pas moins de trois mille deux cents kilogrammes de roses — 3.200 — pour produire un kilogramme d’huile essentielle.

Or, par cette belle matinée de mai, exactement le 15 mai 1903, un convoi nombreux se forme non loin de la frontière macédonienne. Il comprend une quarantaine de bourricots, en tête desquels marche une belle ânesse blanche qui agite fièrement son collier de sonnailles. C’est la conductrice que suivent docilement les autres qui s’en vont philosophiquement, à la queue leu leu, chacun à son rang. La récolte est abondante et les mannes semblent lourdes.

Les champs où s’est opérée la récolte sont situés en contre-bas de ce village de Gavésevo, placé lui-même à l’extrême limite du sol bulgare, sur cette route qui, de Kostendil, en Bulgarie, conduit à Koumanova en Macédoine. C’est à moins d’un kilomètre de Gavésevo que les patriotes, cernés par les Turcs, s’ouvrirent, avec la nitroglycérine, ce chemin qui les fit passer en territoire bulgare, au moment où ils allaient être massacrés.

Or, le convoi d’ânes chargés de roses, au lieu de se diriger vers les distilleries de Kostendil, monte les escarpements qui encaissent la route internationale, oblique à gauche et enfile résolument la passe qui mène en Macédoine. En tête, près de l’ânesse blanche,