Page:Boussenard - La Terreur en Macédoine, Tallandier, 1912.djvu/30

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outé et exécré, toujours debout, comme une menace et une insulte permanentes. Il le crosse d’un coup de pied, l’abat et le roule dans la fange. À ce moment, un premier bandit échappe à la cohue. Il se glisse à travers les membres et les torses tassés, et apparaît. Il voit l’outrage infligé à la bannière de son chef… le sacrilège à l’emblème séculaire. Il s’écrie d’une voix étranglée par la fureur.

« Paysan !… je vais te hacher tout vif ! »

Joannès lève sa terrible faux et riposte :

« Voleur ! je vais te saigner comme un pourceau ! »

Le bandit se présente un peu de biais, le col tendu, la tête penchée, pour mieux voir et s’élancer. Il n’a point le temps de faire un seul pas. Avec une adresse et une vigueur inouïes, Joannès prend juste le moment où il se ramasse pour bondir. La faux, manœuvrée par un bras d’athlète, s’abat de trois quarts, en sifflant, presque sur la nuque.

Il y a un cri… un grognement plutôt, qui s’accompagne d’un éclair rouge… puis un jet de sang gicle, énorme en une coulée de pourpre… et la tête roule à quatre pas du corps, qui tombe en avant, tout flasque.

« Après les chevaux, les hommes ! » crie de sa voix de métal Joannès.

Et les autres, toujours groupés sous le hangar, murmurent de leurs voix gémissantes :

« Il a osé !… oh !… il a osé tuer un de ceux à Marko. »

Un deuxième bandit se présente. La mort de son camarade l’exaspère, mais aussi l’épouvante. Oh ! les temps sont changés ! Quoi !… ces paysans se défendent… ces moutons deviennent enragés. Il hésite une