Page:Boutroux - La Monadologie.djvu/154

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10. Je prends aussi pour accordé que tout être créé est sujet au changement, et par conséquent la Monade créée aussi, et même que ce changement est continuel dans chacune.

11. Il s’ensuit de ce que nous venons de dire, que les changements naturels des Monades viennent d’un principe interne, puisqu’une cause externe ne saurait influer dans son intérieur[1] (§ 396, § 900).

12[2]. Mais il faut aussi qu’outre le principe du changement il y ait un détail de ce qui change, qui fasse pour ainsi dire la spécification et la variété des substances simples.

13. Ce détail doit envelopper une multitude dans l’unité ou dans le simple. Car tout changement naturel se faisant par degrés, quelque chose change et quelque chose reste ; et par conséquent il faut que dans la substance simple il y ait une pluralité d’affections et de rapports, quoiqu’il n’y en ait point de parties.

14. L’état passager, qui enveloppe et représente une

  1. Les causes externes ou mécaniques modifient les rapports des parties entre elles, c’est-à-dire les déterminations quantitatives des choses. Mais la monade, considérée du dedans, n’a pas de parties, pas de rapport à la quantité. C’est pourquoi l’objet comme le principe de l’effort qui la constitue est exclusivement interne.
  2. Ici se trouvait primitivement la proposition suivante : Et généralement on peut dire que la force n’est autre chose que le principe du changement. Cette proposition, venant après la proposition 11, montre très nettement que la force et la spontanéité interne ou tendance à des perceptions distinctes ne sont pas pour Leibnitz deux qualités différentes, mais que la seconde n’est que le fonds et la source éminente de la première. Si Leibnitz a retranché cette proposition, c’est vraisemblablement que la « force » était encore, à ses yeux, un terme trop physique et trop pauvre pour désigner le principe interne du changement. Le terme force ne représente qu’un degré vers la connaissance de ce principe ; et il se résout dans les expressions plus métaphysiques de perception et d’appétition.