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55. Et c’est ce qui est la cause de l’existence du meilleur[1], que la sagesse fait connaître à Dieu, que sa bonté le fait choisir, et que sa puissance le fait produire[2] (§ 8, 78, 80, 84, 119, 204, 206, 208. Abrégé object, 1, object. 8).

56. Or cette liaison ou cet accommodement de toutes les choses créées à chacune et de chacune à toutes les autres, fait que chaque substance simple a des rapports qui expriment toutes les autres, et qu’elle est par conséquent un miroir vivant perpétuel de l’univers (§ 130, 360).

57. Et, comme une même ville regardée de différents côtés paraît toute autre, et est comme multipliée perspectivement ; il arrive de même, que par la multitude infinie des substances simples, il y a comme autant de différents univers, qui ne sont pourtant que les perspectives d’un seul selon les différents points de vue de chaque Monade.

  1. Ceci est l’indication de la célèbre théorie de l’optimisme. Le monde actuel est le meilleur possible, c’est-à-dire celui qui forme le plus riche composé, où la place a été le mieux ménagée, où le plus grand nombre possible d’éléments, susceptibles de réaliser par leur développement la plus parfaite harmonie, ont été appelés à l’existence. Ceci ne veut nullement dire que le monde ne contienne aucun mal, ni même que la part des maux y soit petite. Les imperfections qui préexistaient nécessairement à la création dans les possibles et par lesquelles ils se distinguaient de Dieu ne sauraient disparaître après la création : autrement celle-ci aurait pour effet de donner un sosie au Créateur, ce qui est absurde. Mais Dieu a choisi la combinaison dans laquelle la part du mal était le plus restreinte (Voy. sup., p. 109).
  2. La sagesse ou connaissance a, comme on voit, le rôle prépondérant. La bonté est déterminée par elle infailliblement, sinon fatalement et la puissance ne fait guère qu’écarter les obstacles qui arrêtaient le développement de certains possibles, en réduisant à l’impuissance les possibles jugés indignes d’exister, de manière que les possibles élus puissent réaliser le développement auquel ils aspiraient.