Page:Boy - Histoires désobligeantes, Crès, 1914.djvu/16

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dont nul ne parle et ne veut entendre parler…

Quelqu’un se souvient-il encore de la merveilleuse extermination de Saint-Pierre Martinique, où trente mille êtres humains furent anéantis, en trente secondes, par le souffle silencieux d’un volcan du voisinage ?

Vous m’avez dit, Marchenoir, qu’à cet instant même votre fille faisait sa première communion et qu’il n’avait pas fallu une victime de moins à cette innocente pour que l’acte prodigieux qu’elle accomplissait fût ineffaçablement et très singulièrement marqué pour elle de ce geste colossal de la Mort. Car c’est bien là votre manière d’expliquer les événements de ce monde, ô concentrateur effrayant ! et je crois que vous avez raison mille fois, mais il y a de quoi rêver sur ce gouffre.

Lorsque la petite fille qui précédait la vôtre reçut le Corps du Christ, tout un peuple vivait encore ;… lorsque vint le tour de celle qui la suivait, tout était fini pour ce peuple. Custodiat animam tuam Cette parole avait suffi. Plus de banques, plus de boutiques, plus de tribunaux, plus de bureaux d’affaires ni de bureaux d’amour, plus d’églises même. À quinze cents lieues, on était des morts, une ville morte, on était devenu le Silence, tout à coup.

Vous a-t-on dit, cependant, qu’il y eut un homme épargné, un seul, et que cet homme était précisément un condamné à mort ? On se réjouis-