Page:Brongniart - Plans du Palais de la Bourse de Paris et du cimetière Mont-Louis.djvu/26

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La règle des convenances ne nous permet ni d’exprimer ici tous les sentiments que ces témoignages de considération nous ont fait éprouver, ni d’entrer dans le détail des hommages rendus à celui auquel nous étions attachés par tant de liens ; cependant nous ne pouvons nous empêcher de rapporter quelques particularités de la cérémonie funèbre ; elles ne sont pas seulement honorables pour M. Brongniart, mais elles sont encore comme une espèce de privilège propre à la profession libérale qu’il avoit embrassée.

Nous l’avons souvent dit dans le cours de cette Notice, parce que cette circonstance nous affecte vivement et continuellement : deux monuments remarquables s’élevoient sous la direction de M. Brongniart, lorsqu’il nous a été enlevé. Tous deux sont des monuments publics de genre et d’objets bien différents : l’un, consacré au repos éternel et aux souvenirs ; l’autre, au travail et à la prospérité qui en résulte. Deux fois il est entré dans celui-ci avec pompe, et deux fois cette pompe a été accompagnée de circonstances touchantes.

Le 24 mars 1808, M. Brongniart posa la première pierre du Palais de la Bourse ; cérémonie où tout est espérance, où toutes les pensées se dirigent vers l’avenir ; cérémonie dans laquelle l’architecte a l’honorable prérogative d’inscrire son nom sur les monuments matériels les plus durables que puisse élever la main des hommes, et de l’y joindre aux noms de ce qu’il y a de plus distingué dans l’État. Son petit-fils, âgé de sept ans, et un architecte octogénaire[1], bisayeul maternel de cet enfant, la scellèrent en même temps.

Le 8 juin 1813, une cérémonie qui anéantit toute espérance, qui reporte au contraire toutes les pensées sur ce qui n’est plus, amena dans ce même lieu les restes mortels de M. Brongniart. Les maîtres des ouvriers étoient venus demander qu’on fît traverser au convoi funèbre l’enceinte des travaux de la Bourse. Au moment où le corps de M. Brongniart, accompagné de ses élèves, de ses confrères et d’un grand nombre d’artistes qui l’avoient aimé, pénétra dans cette enceinte, tous les ouvriers descendirent à la hâte de leurs échafauds ; ils se rangèrent en haie, la tête découverte, et rendirent, par une contenance qui exprimoit en même temps l’affection et le respect, un hommage spontané à l’artiste dont ils continuoient d’exécuter les conceptions.

Le convoi resta un moment stationnaire devant la façade du monument, moment cruel pour quelques-uns des assistants, et qu’il leur eût même été impossible de supporter, sans les honorables et touchants souvenirs

  1. M. Hazon, ancien intendant des bâtiments du roi, et membre de l’Académie d’architecture.