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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

« Il y avait dans ce temps-là un Religieux, nommé Subhadra, qui possédait les cinq connaissances surnaturelles ; il demeurait dans la ville de Kuçinagarî, et passait le jour auprès du grand lac Anavatapta[1]. Le mendiant Raktâkcha se rendit au lieu où se trouvait Subhadra ; et quand il y fut arrivé, il lui raconta l’affaire en détail [etc. comme ci-dessus, jusqu’à :] Il faut que dans sept jours d’ici tu te rendes à Çrâvastî. Mais Subhadra répondit : Il n’est pas bien à vous d’avoir provoqué le Çramaṇa Gâutama à faire usage de sa puissance surnaturelle. Pourquoi cela ? Le voici : ma résidence est à Kuçinagarî, et je passe le jour auprès du grand lac Anavatapta. Or le Çramaṇa Gâutama a un disciple, nommé Çâriputtra, qui a un novice nommé Tchunda[2], et ce Çâriputtra passe aussi le jour auprès du grand lac Anavatapta. Mais les Divinités elles-mêmes qui habitent ce lac ne croient pas devoir [me] témoigner autant de respect qu’à ce Religieux. En voici un exemple. Quand j’ai parcouru Kuçinagarî pour y recueillir des aumônes, et que j’ai reçu de quoi faire mon repas, je me rends auprès du grand lac Anavatapta. Mais les Divinités du lac ne vont pas y puiser de l’eau pour moi et ne viennent pas m’en offrir. Tchunda, obéissant aux ordres de son maître, prend les haillons dont il se couvre, et se rend au grand lac Anavatapta. Alors les Divinités qui l’habitent, après avoir lavé ces haillons, aspergent leur corps de l’eau qui leur a servi à cet usage. Ce sage, dont le disciple a un disciple dont nous ne sommes pas même les égaux, est celui que vous avez provoqué à opérer des miracles supérieurs à ce que l’homme peut faire. Vous n’avez pas bien fait de le provoquer à montrer sa puissance surnaturelle ; car je sais bien que le Çramaṇa Gâutama est doué de grandes facultés surhumaines et qu’il a une grande puissance. Raktâkcha lui répondit : Ainsi tu prends le parti du Çramaṇa Gâutama ; il ne faut pas que tu viennes. Aussi, reprit Subhadra, je compte ne pas aller à Çrâvastî. « Prasênadjit, roi du Koçala, avait un frère nommé Kâla, beau, agréable à voir, gracieux, plein de foi [dans le Buddha], bon et doué d’un cœur vertueux. Un jour qu’il sortait par la porte du palais de Prasênadjit, une des femmes renfermées dans la demeure royale, qui se trouvait sur la terrasse, ayant vu le jeune prince, jeta en bas une guirlande de fleurs, qui tomba sur lui. Le monde est composé d’amis, d’ennemis et d’indifférents. On alla donc dire à Prasê-

  1. Cela ne pouvait avoir lieu qu’en vertu d’un miracle, si le lac Anavatapta est en réalité le Râvaṇa hrada.
  2. Le mot que je traduis par novice est Çrâmaṇêra ; je reviendrai sur ce titre dans la section de la discipline. Tchunda fut un des premiers disciples de Çâkya ; au moment de sa mort, il passait pour un de ses quatre Auditeurs les plus instruits. (Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 315.) On trouve son nom cité par le Vocabulaire pentaglotte, dans la liste des anciens personnages respectables, sect. XXI.