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XXI
NOTICE SUR LES TRAVAUX DE M. EUGÈNE BURNOUF.

sa main, avec les remarques que lui fournissaient les rares irrégularités que Vopadéva s’est permises ; j’ai vu également toutes les variantes préparées pour chacun des neuf livres, et un long travail très-curieux sur les noms propres renfermés dans le Bhâgavata, qu’il avait fallu traduire, pour en faire mieux comprendre la force et la portée. Le Bhâgavata-Pourâna demeure inachevé, bien que quelques travaux soient faits en partie pour les livres suivants. Quelles mains pourront terminer ce monument ?

J’en puis demander tout autant, et avec bien plus de tristesse encore, pour l’Introduction à l’histoire du Bouddhisme indien. Mais voyons ce qui appartient en propre à M. Eugène Burnouf dans cette grande révélation des origines authentiques d’une religion qui compte plus de trois cents millions de sectateurs, depuis le Népâl jusqu’à Ceylan, et depuis le Cachemire jusqu’à la Chine. Grâce à des travaux heureux et considérables de MM. Abel Rémusat, Turnour, Schmidt, Csoma de Körös, Éd. Foucaux, on peut connaître en partie l’histoire et les dogmes du bouddhisme. Mais les Chinois, les Singhalais, les Mongols et les Thibétains n’avaient fait que des traductions ; et quelques précieuses qu’elles fussent, elles ne pouvaient tenir lieu des originaux. C’est un Anglais, M. Brian Houghton Hodgson, qui eut la gloire de les découvrir dans les monastères bouddhiques du Népâl, contrée de l’Inde septentrionale où toutes les traditions asiatiques reportaient le berceau de la religion de Bouddha. Pendant vingt-cinq ans de séjour et de recherches, M. Hodgson, résident de Kathmandou, se procura tous les livres canoniques ; et avec une libéralité qu’on ne saurait trop louer, il en communiqua des copies aux Sociétés asiatiques de Calcutta, de Londres, de Paris. Lui-même publiait sur le bouddhisme les renseignements les plus étendus et les plus neufs, tirés de ces matériaux jusqu’alors inconnus. La Société asiatique de Paris possédait quatre-vingt-huit ouvrages bouddhiques donnés ou procurés par M. Hodgson ; ils étaient tous en sanscrit, et ils recelaient le trésor entier d’une religion immense.

Mais il fallait les lire et nous les expliquer. Ce fut la tâche à laquelle se dévoua M. Eugène Burnouf ; il y était préparé dès longtemps ; et par une coïncidence assez remarquable, le bouddhisme, qu’il étudiait au début de sa carrière, quand il publiait en 1826 l’Essai sur le pâli, est aussi le dernier sujet qu’aura touché sa main mourante. Il serait bien inutile d’analyser ici de nouveau l’Introduction à l’histoire du Bouddhisme indien ; cette analyse a été faite dans le Journal des Savants par M. Biot (cahier d’avril 1845), et l’on ne refait pas ce que M. Biot a une fois traité. Tous les mérites de ce grand livre ont été mis en lumière, et pleine justice a été rendue ; je n’insiste donc pas, et je me contente de me référer au jugement de notre illustre confrère.

L’Introduction à l’histoire du Bouddhisme indien devait comprendre un second volume où M. Eugène Burnouf se proposait de faire sur la collection des légendes bouddhiques en pâli ce qu’il avait fait sur la collection du Népal en sanscrit. Il se proposait aussi dans cette autre partie de son œuvre de discuter avec toute l’étendue nécessaire la question de la date du bouddhisme. Il adoptait le système singhalais