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DU BUDDHISME INDIEN.

philosophique et historique. Il y a telle mauvaise étymologie qui a pu être adoptée pour répondre à un ordre d’idées qu’elle favorisait, sans que le traducteur qui lui donnait cours fût coupable d’infidélité envers le texte. Ces erreurs, jusqu’à un certain point volontaires, sont rares, et elles n’infirment ni l’autorité ni la véracité des Lotsavas tibétains, les seuls, avec les interprètes barmans, dont j’ai pu par moi-même vérifier l’exactitude. Je le répète, leurs traductions sont d’une extrême littéralité ; elles rendent, autant que cela est possible avec un instrument aussi sèchement analytique que le tibétain et le barman, tous les traits de ces synthèses heureuses renfermées dans l’unité expressive d’un terme sanscrit. Mais les remarques précédentes ne m’autorisent pas moins à conclure que, malgré le mérite de ces versions, il est toujours indispensable de recourir aux originaux sur lesquels ces versions ont été faites, et que c’est seulement de l’étude du texte même que doit résulter et l’appréciation de son véritable caractère, et la solution des questions très-nombreuses et très-délicates que ces textes ne peuvent manquer de faire naître. Cette conclusion, qui n’a jamais été contestée pour aucun genre d’écrits, ni pour aucune littérature, avait besoin d’être rappelée, au moment où il est question d’indiquer la place que doivent occuper, dans l’ensemble des matériaux destinés à l’étude du Buddhisme, les livres écrits en sanscrit que nous devons au zèle et à la libéralité de M. Hodgson.

Les faits que je viens d’établir donnent lieu à deux observations d’une grande importance pour la suite des recherches dont la collection népâlaise doit être l’objet. La première, c’est que les traductions des livres sanscrits exécutées au Tibet, dans la Tartarie et en Chine, en fixant les diverses époques où ces livres ont commencé à se répandre hors de l’Inde, fournissent une limite précise au-dessous de laquelle il n’est pas possible de faire descendre la rédaction du texte original sanscrit. Le goût que les Chinois et les Tibétains, par exemple, ont toujours eu pour la précision historique, promet, sous ce rapport, de précieux secours à la critique européenne. Il est permis d’espérer qu’au moins dans le plus grand nombre de cas, la date à laquelle ont été exécutées les traductions des livres sanscrits, qui, en leur qualité d’ouvrages réputés inspirés, sont tous également attribués à Çâkya, aura été marquée avec exactitude par les interprètes. Je n’ai pas besoin d’observer qu’aucune indication de ce genre n’est à négliger, puisque l’œuvre de l’interprétation ne s’est pas accomplie en même temps chez les diverses nations qui ont adopté le Buddhisme. Ce que je me contente d’indiquer ici peut déjà se vérifier par l’examen de la bibliothèque buddhique tibétaine, à laquelle les analyses si exactes et si substantielles de Csoma de Cörös nous ont donné accès. On sait maintenant avec certitude que