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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

Mais si cela est ainsi, nous pouvons dire que l’Abhidharma rentre par son origine dans la classe des Sûtras, et que la section des ouvrages métaphysiques doit surtout son existence, en tant que section distincte, à un travail de compilation qui l’a extraite de l’enseignement du Buddha ; et en poursuivant ces conséquences, nous pouvons affirmer avec les Buddhistes du Népâl que les Sûtras sont véritablement la parole du Buddha, Buddha vatchana, et le texte fondamental, Mûla grantha. Il reste encore à côté des Sûtras la section du Vinaya ; mais nous avons vu quelles analogies offrent, au moins quant à la forme, les livres qui composent ces deux classes, puisque divers traités rangés par les Népâlais au nombre des Sûtras sont placés, d’après les Tibétains, parmi les sources du Vinaya. On comprend d’ailleurs sans peine que les points de Vinaya ou de discipline qui passent pour établis par Çâkya lui-même n’ont pu l’être que dans ses discours, ou d’une manière plus générale dans sa prédication ; et comme les Sûtras renferment cette prédication, il est permis de dire que le Vinaya n’est qu’une partie des Sûtras, une section composée de ceux des discours de Çâkyamuni qui ont plus spécialement trait à la discipline.

Dans le cours des observations auxquelles vient de donner lieu la classification la plus générale des livres buddhiques, j’ai rapporté l’origine de ces livres à Çâkyamuni, c’est-à-dire au dernier des sept Buddhas humains dont la tradition a gardé le souvenir[1]. Je n’ai fait que reproduire sur ce point l’opinion des Népâlais, qui attribuent au dernier des Buddhas qu’ils reconnaissent la composition ou la rédaction de leurs livres sacrés. La date de ces livres se trouve ainsi placée dans les temps historiques, et mise à l’abri de toutes les incertitudes et de tous les doutes qu’elle pourrait faire naître, si la tradition l’eût rattachée à l’existence de tel ou tel de ces anciens Buddhas, qui, s’ils ont jamais existé, échapperont longtemps encore à la prise de la critique historique. Sans doute il ne résulte pas encore de ce témoignage une précision bien rigoureuse pour la détermination d’un fait qu’il serait si important de fixer de la manière la plus exacte, puisque l’époque du dernier Buddha est un point contesté entre les diverses écoles buddhiques. C’est cependant déjà un avantage que d’être dispensé d’examiner, au début d’une recherche d’histoire littéraire, la question de savoir quand ont existé les six Buddhas qui ont précédé, dit-on, Çâkyamuni, ou d’avoir à démontrer, comme le pensent des critiques habiles, que ces Buddhas doivent leur existence au désir qu’aurait eu le dernier d’assurer à sa doctrine le mérite d’une tradition consacrée par une longue suite d’anciens sages. Grâce à la bonne foi des Népâlais, cette question des Buddhas antérieurs à Çâkya est tout à fait distincte de

  1. Hodgson, Notices, etc., dans Asiat. Researches, t. XVI, p. 422.