Page:Calmettes - Leconte de Lisle et ses amis, 1902.djvu/50

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celle-là » qui voulait dire : « Devant le charme, je m’incline. »

On conçoit qu’elle ait eu pour admirateurs émus tous ceux des amis de son mari qui vécurent dans le rayonnement de sa grâce. Le mari, Jobbêt, que nous avons connu gardant, au seuil de la vieillesse, l’élan d’entreprise et le besoin d’envergure qui sont ordinairement le privilège de la jeunesse, était né dans la patrie de La Tour d’Auvergne, au bourg même de Carhaix, et, lorsqu’il parlait de ses exploits d’artiste, avec sa voix de tête âpre et forte, avec les coups de rehaut qu’il imprimait à son front pour prendre à témoin le ciel, il avait assez l’air du premier grenadier de France. Après un début au Salon de 1849, il exposait en 1850 un Jeune malade qui lui valut un succès. Ce succès fut suivi par trente années de production et de commandes, dont on peut voir, au plafond de l’escalier des Archives, un spécimen, lourd et roussâtre, qui semble peint à la poussière de brique avec de l’huile cuite. Quoi qu’il en dût être pour l’avenir, Jobbé, fort content du présent, célébra l’apparition du Jeune malade comme un fait principal à mettre en vedette dans les fastes de l’art contemporain. Il l’érigeait en date historique.

Or la première année de l’ère inaugurée par l’épiphanie du Jeune malade fut précisément celle où de Flotte conquit un siège à la Législative. Éloigné de sa mère qui vivait à Châteaulin, non marié, de Flotte, sincère et tendre, avait besoin de l’intimité familiale, qui lui fut offerte au foyer de son ami Jobbé. Il venait s’y rafraîchir du feu de sa politique, y prenait ses repas et s’estimait heureux d’apporter au ménage d’artiste sa bonne part de la dépense commune. En se mariant, Jobbé-Duval avait quitté son rez-de chaussée de la rue du Cherche-Midi pour venir habiter, rue de Vaugirard, un petit appartement composé de trois pièces en enfilade, aboutissant à l’atelier. Cette disposition, qui semblerait fort gênante aujourd’hui, suffi-