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mortel, disaient-ils; l'amour vrai, péché véniel. Que sont-ils devenus, ces rigoristes qui , regar- dant la chevalerie comme une espèce de sacer- doce , se vouaient au célibat , rappelaient sans cesse Faustérité de l'institution primitive qui dé- fendait le mariage, et nepermettaitcpie l'amour? Où était-il ce digne Koucicaut , qui n'osait révéler son amour à sa dame qu'à la troisième année , et qualifiait d'étourdis les audacieux qui s'expli- quaient dès la première? Iléias ! cette sorte

d'étoiudis commençait à devenir bien rare, si l'on en croit M. de Sainte-Palaye ; et il faut bien l'en croire. Il avoue, en gémissant, que la licence des mœurs était au comble. IMais , ce qui Tafllige encore plus , c'est d'entrevoir les reproches bien plus graves que l'on peut faire à l'ancienne che- valerie. Il convient que , chargée dès sa naissance du principal vice de la féodalité, elle reproduisit lîientôt tous les désordres qu'elle avait réprimés d'abord. Il regrette que ces chevaliers , si redou- tables aux ennemis pendant la guerre , le fussent encore plus aux citoyens , et pendant la guerre et pendant la paix : il se plaint qu'un préjugé bar- bare, admis et adopté par les lois de la chevalerie, eut semblé ne vouer leurs vertus même qu'au service et à l'usage de leurs seuls égaux , ou do ceux au moins que la naissance approchait plus près d'eux : vertus dès-lors presqu'inutiles à la patrie, et qui se faisaient à elles-mêmes l'in- jure de borner le plus beau , le plus sacré de tous

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