Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/385

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son nom. Elle se donne elle-même pour ce qu’elle est.

— On croit communément que l’art de plaire est un grand moyen de faire fortune : savoir s’ennuyer est un art qui réussit bien davantage. Le talent de faire fortune, comme celui de réussir auprès des femmes, se réduit presque à cet art-là.

— Il y a peu d’hommes à grand caractère qui n’aient quelque chose de romanesque dans la tête ou dans le cœur. L’homme qui en est entièrement dépourvu, quelque honnêteté, quelque esprit qu’il puisse avoir, est, à l’égard du grand caractère, ce qu’un artiste, d’ailleurs très-habile, mais qui n’aspire point au beau idéal, est à l’égard de l’artiste, homme de génie, qui s’est rendu ce beau idéal familier.

— Il y a de certains hommes dont la vertu brille davantage dans la condition privée, qu’elle ne le ferait dans une fonction publique. Le cadre les déparerait. Plus un diamant est beau, plus il faut que la monture soit légère. Plus le chaton est riche, moins le diamant est en évidence.

— Quand on veut éviter d’être charlatan, il faut fuir les tréteaux ; car, si l’on y, monte, on est bien forcé d’être charlatan, sans quoi l’assemblée vous jette des pierres.

— Il y a peu de vices qui empêchent un homme d’avoir beaucoup d’amis, autant que peuvent le faire de trop grandes qualités.

— Il y a telle supériorité, telle prétention qu’il