Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/455

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c’est après les éruptions des volcans que la terre est plus fertile.

— La vanité des gens du monde se sert habilement de la vanité des gens de lettres. Ceux-ci ont fait plus d’une réputation qui a mené à de grandes places. D’abord, de part et d’autre, ce n’est que du vent ; mais les intrigans adroits enflent de ce vent les voiles de leur fortune.

— Les économistes sont des chirurgiens qui ont un excellent scalpel et un bistouri ébréché, opérant à merveille sur le mort et martyrisant le vif.

— Les gens de lettres sont rarement jaloux des réputations quelquefois exagérées qu’ont certains ouvrages de gens de la cour ; ils regardent ces succès comme les honnêtes femmes regardent la fortune des filles.

— Le théâtre renforce les mœurs ou les change. Il faut de nécessité qu’il corrige le ridicule ou qu’il le propage. On l’a vu en France opérer tour à tour ces deux effets.

— Plusieurs gens de lettres croient aimer la gloire et n’aiment que la vanité. Ce sont deux choses bien différentes et même opposées ; car l’une est une petite passion, l’autre en est une grande. Il y a, entre la vanité et la gloire, la différence qu’il y a entre un fat et un amant.

— La postérité ne considère les gens de lettres que par leurs ouvrages, et non par leurs places. Plutôt ce qu’ils ont fait que ce qu’ils ont été, semble être leur devise.