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66 OEUVRES

(les l'ahlos n'ait lait des opéras peu connus : le res- sentiment qu'il conçut contre la mauvaise loi de cet Italien , lui lit trouver dans le peu qu'il avait de bile ^ de quoi faire une satire violente ; et sa gloire est qu'on puisse en être si étonné ; mais , après ce premier mouvement , redevenu La Fon- taine , il reprit son caractère véritable , qui était celui d'un enfant , dont en effet il venait de mon- trer la colère. Ce n'est pas un spectacle sans in- térêt que d'observer les mouvemens d'une âme qui , conservant même dans le monde les pre- miers traits de son caractère , sembla toujours n'obéir qu'à l'instinct de la nature. Il connut et sentit les passions; et, tandis que la plupart des moralistes les considéraient comme des ennemis de l'homme , il les regarda comme les ressorts de notre âme , et en devint même l'apologiste. Cette idée , que les philosophes ennemis des stoïciens avaient rendue familière à l'antiquité , paraissait de son temps inie idée nouvelle ; et si l'auteur des fables la développa quelquefois avec plaisir , c'est qu'elle était pour lui une vérité de sentiment , c'est que des passions modérées étaient les instru- mens de son bonheur. Sans doute le philosophe ,-* dont la rigide sévérité voulut les anéantir en soi- même, s'indignait d'être entrauié par elles , et les redoutait comm^l'intempérant craint quelquefois les festins. La Fontaine , défendu par la nature contre le danger d'abuser de ses dons , se laissa guider sans crainte à des peuchans qui l'égarèrent

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