Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

DE CHAMFORT. yi

un homme qui fut un des ornemens de son siècle , qui devint le successeur immédiat de Colbert lui- même à l'Académie , et le loua d'avoir protégé les lettres. Une fois négligé , ce fut une raison de l'être toujours , suivant l'usage , et le mérite de La Fontaine n'était pas d'un genre à toucher vive- ment Louis XIV. Peut-être les rois et les héros sont-ils trop loin de la nature pour apprécier un tel écrivain : il leur faut des tableaux d'histoire plutôt que des paysages ; et Louis xiv , mêlant à la grandeur naturelle de son âme quelques nuances de la fierté espagnole qu'il semblait tenir de sa mère, Louis XIV, si sensible au mérite des Cor- neille , des Racine , des Boileau , ne se retrouvait point dans des fables. C'était un grand défaut , dans un siècle où Despréaux fit un précepte de l'art poétique , de former tous les héros de la tra- gédie sur le monarque français (i) ; et la descrip- tion du passage du Rhin importait plus au roi que les débats du lapin et de la belette.

Malgré cet abandon du maître , qui retarda même la réception de l'auteur des fables à l'Aca- démie française: malirré la médiocrité de sa for- tune, La Fontaine ( et l'on aime à s'en convaincre), La Fontaine fut heureux ; il le fut même plus

��(i) Que Racine , enfantant des miracles nouveaux ,

De SCS héios sur lui forme tous les tableaux.

BOILEAC , Ari, pvél.

�� �