Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/215

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les issues, pour voir cette nouveauté républicaine. On en augmente sans cesse la pompe tumultueuse, bizarre, et cependant imposante. Tout s’anoblissait par l’idée d’honorer avec éclat deux hommes qu’on croit victimes de leur généreux amour pour le peuple. Les rues Grenéta, Saint-Denis, la Fé- ronnerie, Saint-Honoré, par où passent successivement les images devenues momentanément l’objet du culte public, contiennent à peine les flots de citoyens qui se succèdent avec une rapidité toujours croissante.

C’est avec cet immense cortége que les bustes arrivent à la place Vendôme. On les promène autour de la statue de Louis xiv O changemens opérés par la révolution d’un siècle ! Là, fut élevé, par l’adulation servile d’un courtisan, le bronze de ce monarque, qui, d’un regard, faisait trembler sa cour, vit près de soixante ans son peuple à ses genoux ; et maintenant Ce sont les suites de son despotisme, de son faste orgueilleux, qui, de loin, préparaient les afflictions douloureuses d’un de ses petits-fils. L’esprit du peuple est changé. Ce ne sont plus ces Parisiens, ridicules héros de la fronde, fuyant devant quelques soldats soudoyés pour contenir ou châtier des bourgeois : c’est pourtant ce que l’on croyait ; mais on se trompa. Un détachement de Royal-Allemand se précipite sur ces bourgeois devenus citoyens, qui ne prennent point la fuite, comme les stipen- diaires s’en étaient flattés. L’action fut vive ; plu-