Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/298

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DE CIIAMFOIIT. 287

bien ! leur dit il, il faut tenir note de tout cela. » Et il leur tourna le dos. Ils le notèrent trop pour son malheur ; car ils répandirent par-tout leurs défiances. Les mots de perfidie, de trahison, cir- culèrent dans la salle, et de là dans tous les quar- tiers de Paris, d’où ils revenaient encore à l’hôtel- de-ville plus violens et plus envenimés.

Il multipliait les imprudences. A des hommes furieux qui voulaient être armés sur-le-champ, il parlait d’un directeur des armes de Charleville qui devait leur envoyer d’abord douze mille fu- sils et ensuite trente mille. A d’autres, il conseil- lait d’aller prendre des cartouches à l’Arsenal, où il n’y avait point de cartouches; d’aller chercher des armes au couvent des Chartreux, où il n’y a point d’armes. Il croyait tromper leur fureur, qu’il ne faisait quaccroître, et qui à leur retour se mon- trait plus menaçante. De grandes caisses étant arrivées à Thôtel-de-ville avec l’étiquette Artillerie on crut que c’étaient les armes attendues de Charleville, et, pour les soustraire au danger d’un pillage ou d’une distribution indiscrète, on les fit. déposer dans une salle de l’hôtel-de- ville, jusqu’à l’arrivée d’un détachement de gardes-françaises qui devaient faire cette distribution dans les districts. Rien n’était plus sage que cette mesure, qui asso- ciait de plus en plus les citoyens et les soldats ; mais elle devint funeste au prévôt des marchands. Les gardes-françaises étant arrivées et l’ouverture des caisses s’étant faite devant eux et en présence