Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/457

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446 OEUVRES

Jeanne, les grands, niéiant leur intérêt particu- lier à la rumeur populaire, demandent impérieu- sement les premières charges de la couronne.

Le roi, forcé de capituler, accorde tout. Parmi les seigneurs napolitains que ce monarque venait d’honorer de dignités nouvelles, parut Caraccioli, élevé au rang de grand-sénéchal. Il réunissait tous les. dons de la figure et de l’esprit. Le choix de la reine (car il fallait un choix ) se décida pour Caraccioli, et sa passion devint publique.

L’adresse du favori, habile à ménager les grands, à s’assurer du peuple, mit bientôt le roi dans les fers de son épouse *, et son appartement devint sa prison. Mais abusant alors de l’accroissement de son crédit, bientôt son pouvoir chancelé ; le peu- ple tourne contre l’amant le même ressentiment qu’il ve;iait de montrer contre l’époux. La cour de Naples députe au roi de France ; et croira-t-on que ce monarque s’adresse au pape pour venger l’injure faite à un prince de sa maison ?

Caraccioli prévoit l’orage ; mais ne paraissant s’occuper que des intérêts de la reine devenus les siens, il prend le parti de s’immoler ;et trom- pant ses ennemis, il dicte lui-même l’arrêt de son exil, le roi Jacques étant toujours détenu.

Du lieu de sa retraite, cet adroit courtisan par- vint à regagner la confiance du pape et à rassurer les princes du sang ; il reparaît l’année suivante à la cour, et fait couronner publiquement sa sou- veraine, sans que le nom de son époux soil» pro-