Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t2.djvu/54

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pWque-t-il pas l’autre ? — Cela est très-bien ce que

vous dites-là, reprit froidement M. D ; mais

je vous dis le fait. J’ai été amené là par degrés : en vivant et en voyant les hommes, il faut que le cœur se brise ou se bronze. »

— C’est une anecdote connue en Espagne, que le comte d’Aranda reçut un soufflet du prince des Asturies ( aujourd’hui roi ). Ce fait se passa à l’é- poque où il fut envoyé ambassadeur en France.

— Dans ma première jeunesse, j’eus occasion d’aller voir dans la même journée M. Marmontel et M. d’Alembert. J’allai le matin chez M. Mar- montel, qui demeurait alors chez madame Geof- frin ; je frappe, en me trompant de porte ; je de- mande M. Marmontel; le suisse me répond : «M. de Montmartel ne demeure plus dans ces quartiers- ci»; et ilme donna son adresse. Le soir, je vais chez M. d’Alembert, rue Saint-Dominique. Je demande l’adresse à un suisse, qui me dit : «M. Staremberg, ambassadeur de Venise ? La troisième porte... — Non, M. d’Alembert, de racadémic française. — ■ Je ne connais pas. »

— M. Ilelvétius, dans sa jeunesse, était beau comme l’amour. Un soir qu’il était assis dans le foyer et fort tranquille, quoiqu’auprès de made- moiselle Gaussin, un célèbre financier a int dire à l’oreille de cette actrice, assez haut pour qu’Hel- vétius l’entendît: «Mademoiselle, vous serait- il agréable d’accepter six cents louis, en échange de quelques complaisances ? Monsieur, répondit-