Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t3.djvu/280

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avait souhaité, dans tous les temps de sa vie , de se placer dans une position capable d'assurer l'impunité à ses vices et à toutes ses fantaisies. C'est à quoi un gouvernement de province était merveilleusement propre. Une place dans le mi- nistère n'offrait cet avantage que passagèrement , et de plus l'exposait à tous les orages de la cour : aussi la refusa-t-il, à la grande surprise des cour- tisans, dont l'égoïsme calculait autrement que le sien. C'est après la mort du maréchal de Belle- Isle que cette offre lui fut faite; mais il était trop empressé d'aller prendre possession de son gou- ment de Guienne , « où il pourrait faire tout ce « qu'il voudrait, et où personne n'oserait lui rien »dire, étant bien avec le maître :w ce sont ses termes. C'est en effet à quoi se réduisait tout le mystère, et M. de Richelieu l'avait très-bien saisi. Il se rendit à Bordeaux après une maladie longue et affliocante, mais utile et secourable: une lèpre universelle qui renouvela toutes ses humeurs, le rajeunit en quelque sorte et le régénéra pour le vice. Il j^ortait à Bordeaux la réputation que devait avoir le ^ainqueur de INÎahon, celle d'être bien à la cour, non moins désirable en province, enfin celle d'homme aimable, qualité qui relevait toutes les autres. Aussi fut-il reçu comme un triomphateur, au milieu des acclamations publi- ques , et avec une sorte d'ivresse. Son désir et son talent de plaire prolongèrent quelque temps cette faveur publique; mais il se lassa bientôt

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