Page:Chapman - Les Fleurs de givre, 1912.djvu/91

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Et ses os blanchiront, perdus dans le mystère,
Jusqu’à l’heure tragique où, frappé de stupeur,
Quelqu’un découvrira les restes du trappeur,
Et les enfouira dans le sein de la terre.

Et celui qui trente ans traqua les animaux
Errant dans l’infini du désert morne et sombre,
En paix sommeillera, loin des hommes, à l’ombre
D’une croix de bois brut faite de deux rameaux.

Et, venant se poser sur cette croix grossière,
Nuit et jour les oiseaux, sous un arbre ondoyant,
De leurs chants berceront le sommeil du vaillant
Dont le bois tant de fois entendit la prière.

Mais peut-être que nul de ses proches, hélas !
N’ira s’agenouiller sur sa fosse lointaine ;
Et seule la forêt, où le vent se déchaîne,
Avec ses bruits plaintifs devra sonner son glas.

Seuls sur lui gémiront les pins et les érables,
Cependant que, mené par le bon saint Hubert
Le long de lacs géants où l’œil humain se perd,
Loubier fera sans fin des chasses ineffables.