Page:Charavay - A. de Vigny et Charles Baudelaire, 1879.djvu/46

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22 que voulez-vous ? Le feu de mon incendie est un vrai feu d’enfer qui ne s’éteint plus ; je souf- fre là dedans comme un vrai damné. Au lieu d’être académicien, je suis mécanicien ; je passe ma vie avec des ouvriers, et mon délassement est avec mon avoué et des avocats. Il faut que je reconstruise des usines que je n’aurais jamais construites, mais que j’avais achetées en état d’aller, pensant n’avoir jamais besoin de m’en occuper autrement. Je n’ai, de la vie, été si malheureux, et vos lettres m’achèvent, Je sens que je ne remplis pas mon devoir, ni mon vœu. Ma conscience et mon amitié en souffrent éga- lement. Mais le boulet que je traine est trop lourd pour que je m’échappe un seul moment. La vie a des parties bien amères; cette année, justement, j’étais en dispositions académiques si complètes, que j’ai mon appartement au fau- bourg Saint-Germain qui m’attend depuis six mois. Mais rien ne me réussit; j’ai eu, il y a quelques vingt ans, une sorte de veine dont je n’ai pas su profiter, et depuis, je perds toujours,