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VI
PRÉFACE.

jourd’hui qu’elle se rencontre également chez les hommes[1]. C’est, nous le répétons, une affection n’ayant rien de commun avec d’autres déviations pathologiques des sens. Il faut délivrer ces malades de la réputation mal fondée qu’on leur a imposée si longtemps. D’ailleurs, ce n’est qu’à regret et contrainte par l’usage que la Science emploie encore aujourd’hui une dénomination dont le sens exact n’a plus aucune relation avec l’étymologie.

Ces précautions prises contre des apparences plutôt que des réalités, nous résumons l’esprit général de nos recherches à travers les monuments du passé qui représentent « des démoniaques ».

Ce n’est point à une époque très reculée que se rapportent les documents figurés que nous avons observés. L’Antiquité, ainsi que nous le dirons tout à l’heure, ne s’est point plu à retracer les spectacles effrayants et tristes qu’offrent les patients pendant les crises. Mais il n’est pas difficile de retrouver les traces de l’affection que nous étudions dans l’histoire des possessions démoniaques qui ont désolé le Moyen Age. Les récits que les témoins oculaires et certainement véridiques ont laissé des faits et des gestes des possédés ne laissent aucun doute à cet égard. L’interprétation surnaturelle que les contemporains ne pouvaient pas ne pas donner de ces phénomènes si extraordinaires disparaît au fur et à mesure que l’investigation scientifique étend ses recherches et que la science moderne recule les limites de ses conquêtes.

Dans ces études de médecine rétrospective, nous suivons d’ailleurs la voie ouverte par d’éminents observateurs, tels que Calmeil, Littré et quelques autres médecins distingués.

Mais les possessions démoniaques, dont l’histoire nous a conservé de longs et minutieux procès-verbaux, sont en quelque sorte décrites avec non moins de force et de véracité dans les œuvres d’art. Des miniatures, des plaques d’ivoire, des tapisseries, des bas-reliefs en bronze, des fresques, des tableaux, des gravures ont retracé des scènes d’exorcisme et figuré les attitudes et les contorsions des « possé-

  1. Voir à ce sujet : M. Charcot, Leçons sur l’hystérie chez l’homme, in Progrès Médical, 1885.