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créait au poète le devoir de ne s’occuper que d’une espèce particulière de conceptions dramatiques, de celles qui eussent assez d’espace pour laisser libre carrière à l’invention du musicien. La rhétorique, le cliché étaient pour le poète un devoir, car c’est sur ce terrain seul que le musicien pouvait trouver la latitude qu’il réclamait, mais qui, en réalité, était tout à fait anti-dramatique.

Si le poëte avait fait parler ses héros d’une façon serrée et précise, il n’aurait obtenu d’autre résultat que de s’attirer le reproche d’avoir rendu son poème impraticable pour le compositeur. Le poète, forcé de mettre dans la bouche de ses héros des phrases banales et vides, n’aurait pas pu, avec la meilleure volonté du monde, donner à ses personnages un caractère réel et imprimer à l’ensemble de leurs actions le cachet de la pleine vérité dramatique. Son drame était tout au plus un prétexte de drame ; quant à songer à tirer les conséquences de son vrai but cela ne pouvait même pas lui venir à l’idée. Il ne faisait, à proprement parler, que traduire le drame dans la langue de l’opéra, de telle sorte que, le plus souvent, il mettait en œuvre pour l’opéra des pièces représentées jusqu’à satiété