Page:Charnacé - Musique et Musiciens, vol2, 1874.djvu/206

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
— 198 —

l’histoire d’une erreur artistique, mais d’une erreur qui ne se termina pas, comme celle du genre de l’Opéra, par la mise en évidence d’une incapacité de la musique, mais par la mise en évidence d’un pouvoir intime illimité. L’erreur de Beethoven fut l’erreur de Colomb[1], qui cherchant un chemin nouveau vers un pays ancien et connu, l’Inde, découvrit un monde nouveau ; Colomb aussi emporta son erreur au tombeau, jurant à ses compagnons qu’il joindrait le nouveau monde par la vieille Inde. Quoique entachée d’une profonde erreur, sa croyance, cependant, arracha le bandeau aux yeux du monde et lui enseigna de la façon la moins contestable la vraie forme de la terre et l’abondance à peine soupçonnée de sa richesse. L’erreur féconde de Beethoven, elle aussi, nous a révélé l’inépuisable puissance de la musique. Grâce à son hardi et intrépide effort pour atteindre le nécessaire artistique dans une impossibilité artistique, nous avons reconnu l’aptitude illimitée de la musique à réaliser tous les problèmes imaginables, pourvu qu’elle ne veuille pas être autre

  1. J’ai déjà comparé Beethoven à Colomb dans mon ouvrage : L’œuvre artistique de l’avenir, je reprends ici cette comparaison, parce qu’elle renferme une analogie importante que je n’ai pas encore touchée.
    (Note de l’auteur.)