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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

au roi la Chambre introuvable. Toutes les voix se portaient sur moi à Orléans, lorsque l’ordonnance qui m’appelait à la Chambre des pairs[1] m’arriva. Ma carrière d’action à peine commencée changea subitement de route : qu’eût-elle été si j’eusse été placé dans la Chambre élective ? Il est assez probable que cette carrière aurait abouti, en cas de succès, au ministère de l’intérieur, au lieu de me conduire au ministère des affaires étrangères. Mes habitudes et mes mœurs étaient plus en rapport avec la pairie, et quoique celle-ci me devînt hostile dès le premier moment, à cause de mes opinions libérales, il est toutefois certain que mes doctrines sur la liberté de la presse et contre le vasselage des étrangers donnèrent à la noble Chambre cette popularité dont elle a joui tant qu’elle souffrit mes opinions.

Je reçus en arrivant le seul honneur que mes collègues m’aient jamais fait pendant mes quinze années de résidence au milieu d’eux : je fus nommé l’un des quatre secrétaires pour la session de 1816. Lord Byron n’obtint pas plus de faveur lorsqu’il parut à la Chambre des lords, et il s’en éloigna pour toujours ; j’aurais dû rentrer dans mes déserts.

Mon début à la tribune fut un discours sur l’inamovibilité des juges : je louais le principe, mais j’en blâmais l’application immédiate[2]. Dans la révolution de 1830 les hommes de la gauche les plus dévoués à

  1. L’Ordonnance portant nomination du vicomte de Chateaubriand à la Chambre des pairs est en date du 17 août 1815.
  2. Opinion sur la résolution relative à l’inamovibilité des juges, prononcée à la Chambre des pairs, le 19 décembre 1815. — Œuvres complètes, tome XXIII, p. 32.