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Conte du Cuisinier.


Prologue du conte du Cuisinier.

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Le cuisinier de Londres, quand parlait l’intendant,
De joie (ce lui semblait) lui caressait le dos.
« Ha, ha, fit-il, ha, ha, par la passion du Christ,
la belle conclusion que ce meunier a vue
clore son argument touchant l’hébergement,
4330Salomon a bien dit vraiment en son langage :
Garde-toi d’accueillir quiconque en ta maison,
car héberger la nuit est périlleuse chose.
Il fait bon que l’on sache
Quelles gens l’on admet en son particulier.
Je veux certes que Dieu peine et souci m’envoie
si jamais, depuis que j’ai nom Hodge[1] de Ware,
j’ai ouï qu’un meunier eut plus de tablature.
On lui fit un bon tour, pardi, en la nuit noire.
Mais sera-t-il donc dit que l’on s’en tiendra là ?
4340Nenni. Et c’est pourquoi, si vous daignez ouïr
un conte dit par moi, qui suis un pauvre diable,
je vous veux raconter, du mieux que je pourrai,
comment un certain tour advint en notre ville. »

    Notre hôte répondit et dit : « J’en suis d’accord,
Allons, conte, Roger, et tâche qu’il soit bon,
car il t’est arrivé de saigner maint pâté,
et il t’est arrivé de vendre maint rassis,
qui fut chaud par deux fois et par deux fois fut froid.
Maint pèlerin pria que le Christ te maudit,
4350qui encore aujourd’hui se sent de ton persil

  1. Diminutif de Roger.