Page:Clairville et Cordier - Daphnis et Chloé, 1866.djvu/6

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pan pan pan,
Et le dieu Pan
Posant sa lèvre
Sur l’instrument.

ENSEMBLE.
PAN.

Pan pan.

CHLOÉ.

Pan pan pan pan,
Oui, le dieu Pan
Charme le tympan.

DAPHNIS.

Pan pan.

(Il essaie en vain de se servir de la flûte.)

Tu sais le rythme et la cadence,
Mieux que moi tu peux l’essayer !

CHLOÉ.

Non, vraiment, je tremble d’avance,
Et ne ferais que bégayer.

PAN.

Mon élève est vraiment jolie,
Et je me mets de la partie.
On l’a pu remarquer souvent,
Pan est un dieu très-complaisant !

DAPHNIS.

Ah ! Chloé, que ta voix charmante
À l’instant
Ravisse mon cœur et l’enchante
Doucement.
Voyons,
Écoutons !

(Chloé prend la flûte, Pan joue.)

Ô prodige nouveau !
Sous mes doigts inhabiles,
Quoi, ce faible roseau
Rend des accents faciles !

DAPHNIS.

Ô prodige nouveau ! etc.

REPRISE DE L’ENSEMBLE.
PAN, DAPHNIS, CHLOÉ.

Pan pan pan,
Oui, le dieu Pan, etc.

PAN, à part. Que j’aime ce tableau naïf et pastoral !

CHLOÉ, se levant. Ah ! grands dieux !

DAPHNIS. Quoi donc ?

CHLOÉ. J’oubliais mon troupeau… voici l’heure à laquelle je dois le conduire à la ferme de Lamon.

DAPHNIS. Je vais t’accompagner.

CHLOÉ. Non, reste là… Tu sais bien que Myrtale gronde toujours quand elle nous voit ensemble… Reste, je reviendrai quand mon troupeau sera rentré.

PAN. Ah ! j’en ai assez de mon rôle de statue, suivons-la !

(Le dieu de pierre, exactement semblable à Pan, revient sur le piédestal. Pan sort ensuite à la poursuite de Chloé qui est sortie avec Robin par la droite.)


Scène V.

DAPHNIS, seul. Elle s’éloigne ! et avec elle tout mon bonheur s’en va… Que faire en l’attendant ?… Si je dormais !… le temps me semblerait moins long. Dormir, c’est oublier ou c’est rêver, et quand je rêve, c’est toujours à Chloé… Oui, là, où tout à l’heure nous étions tous les deux… (Se couchant sur le banc de gazon.)

Air de Psyché.

Même en fermant les yeux,
Je la verrai sans doute ;
Rêve que je redoute,
Pour moi, descends des cieux.
Oui, qu’un rêve ramène
Ces maux que nous aimons,
Pour que Chloé revienne,
Dormons !

II
Hier, je dormais là,

Tout près d’un laurier rose,
Sur ma paupière close,
Une abeille vola.
Chloé chassa l’abeille
Avec des épis blonds,
Pour que Chloé m’éveille,
Dormons !


Scène VI.

DAPHNIS, endormi, LES BACCHANTES.

CALISTO. Eh bien ! c’est entendu, puisque le même amour nous tente, concertons-nous pour soumettre Daphnis.

LOCOÉ. Les dieux ne nous permettent pas d’être rivales !

CALISTO. C’est la plus belle qui doit charmer Daphnis.

DAPHNIS, rêvant. Chloé, chère Chloé !

CALISTO. Quelqu’un est là !

TOUTES. Daphnis !

DAPHNIS, se levant. Chloé, me voici ! (Apercevant les bacchantes.) Grands dieux ! que vois-je ?

CALISTO. Nous avons troublé ton sommeil, tu rêvais sans doute à quelque bergère !

DAPHNIS. Oui, à Chloé, qui, dans mon rêve m’appelait à son secours, et je vais…

LES NYMPHES. On ne passe pas.

DAPHNIS. Ô mesdames les bacchantes, ne me faites pas de mal.

NIOBÉ. Te faire du mal ! Tu nous crois donc bien cruelles !

DAPHNIS. Laissez-moi rejoindre Chloé !

CALISTO. Oh ! pour cela, non, car cette Chloé, nous savons que tu en es amoureux.

DAPHNIS. Amoureux, qu’est-ce que c’est que ça ?