Page:Claudel - Connaissance de l’est larousse 1920.djvu/12

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tandis qu’il s’ouvre jusqu’au fond, se tiennent affaissées et pendantes, et celles du milieu s’écartent de chaque côté tant qu’elles peuvent, et celles du haut, relevées, comme quelqu’un qui ne sait que faire de ses mains ou comme un homme qui montre qu’il s’est rendu, font lentement un signe. La hampe n’est point faite d’un bois inflexible, mais annelée, et, comme une herbe, souple et longue, elle est docile au rêve de la terre, soit qu’elle se porte vers le soleil, soit que, sur les fleuves rapides et terreux ou au-dessus de la mer et du ciel, elle incline sa touffe énorme.

La nuit, revenant le long de la plage battue avec une écume formidable par la masse tonitruante de ce léonin Océan Indien que la mousson du sud-ouest pousse en avant, comme je suivais cette rive jonchée de palmes pareilles à des squelettes de barques et d’animaux, je voyais à ma gauche, marchant par cette forêt vide sous un opaque plafond, comme d’énormes araignées grimper obliquement contre le ciel crépusculaire. Vénus, telle qu’une lune toute trempée de plus purs rayons, faisait un grand reflet sur les eaux. Et un cocotier, se penchant sur la mer et l’étoile, comme un être accablé d’amour, faisait le geste d’approcher son cœur du feu céleste. Je me souviendrai de cette nuit, alors que, m’en allant, je me retournai. Je voyais pendre de