Page:Claudel - Connaissance de l’est larousse 1920.djvu/138

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l’infinie complexité qu’une touche vigoureuse et charmante implique encore plus qu’elle ne sous-entend. C’est le jeu dans la certitude, c’est le caprice dans la nécessité, et l’idée captivée tout entière dans l’argument s’impose à nous avec une insidieuse évidence.

Et pour parler tout d’abord des couleurs : nous voyons que l’artiste japonais a réduit sa palette à un petit nombre de tons déterminés et généraux. Il a compris que la beauté d’une couleur réside moins dans sa qualité intrinsèque que dans l’accord implicite qu’elle nourrit avec les tons congénères, et, du fait que le rapport de deux valeurs, accrues de quantités égales, n’est point modifié, il répare l’omission de tout le neutre et le divers par la vivacité qu’il donne à la conjonction des notes essentielles ; indiquant sobrement une réplique ou deux. Il connaît que la valeur d’un ton résulte, plus que de son intensité, de sa position, et, maître des clefs, il transpose comme il lui plaît. Et comme la couleur n’est autre que le témoignage particulier que tout le visible rend à la lumière universelle, par elle, et selon le thème que l’artiste institue, toute chose prend sa place dans le cadre.

Mais l’œil qui clignait maintenant se fixe, et au lieu de contempler, il interroge. La couleur est une passion de la matière, elle singularise